mardi 31 mars 2009

Printemps social à l'espagnole














Tous les coachs professionnels conseillent la pratique régulière de sport en période de recherche d’emploi, afin de garder un moral et un tonus d’acier. Fidèle à ces préceptes, je me rends presque tous les jours dans un club de fitness, plein à craquer de « desesperate housewifes ». Sans me fondre dans la masse de ces fausses blondes désœuvrées, je suis désormais acceptée, même si je ne participe pas au débat quotidien sur les derniers rebondissements de Fama, la Star Académie espagnole version danse. Ma nationalité fait toujours l’objet d’un jeu de devinettes interminable : russe, anglaise, américaine, roumaine… Autre conséquence de leur connaissance étendue de l’étranger, j’ai renoncé à la prononciation correcte de mon prénom pour opter pour une version hispanisée, intelligible de toutes : « Baleria ».

Les journées se suivent et se ressemblent, pourtant aujourd’hui, il régnait une atmosphère particulière, presque électrique et cela n’avait rien à voir avec le changement d’heure ou le brusque rafraichissement du temps. Un rassemblement s’était formé dans le vestiaire où le volume sonore était encore plus élevé que d’habitude. Une des blondes a foncé vers moi : « tu es au courant, ils vont avancer tous les cours de 30mn ». J’ai pris un air bouleversé, mesurant l’impact majeur sur mon emploi du temps surchargé. J’ai pensé aussi que cela allait impliquer une réorganisation totale pour toutes ces femmes : écourter la sieste, décaler la séance de manucure, trouver un autre créneau pour le 5 à 7 heures avec Tony de la muscu, renoncer à leurs devoirs de mère et laisser Juju rentrer seul de l’école pour ne pas rater le cours d’abdos-fessiers etc. La vie semble parfaite et soudain tout s’écroule. La blonde a poursuivi, porte-parole de la grogne collective : « C’est sûrement à cause de la nouvelle prof de funky. Depuis son arrivée, il n’y en a que pour elle et elle impose ses horaires. Quelle garce ! ». Que faire alors ? Un boycottage collectif du cours de funky s’est rapidement organisé. J’ai exprimé ma solidarité, tout en émettant quelques réserves quant à mon implication, ne sachant pas si je serais là dans un mois et n’ayant rien contre la brunette funkera.

Il y a eu aussi dimanche dernier une mobilisation massive, d’ampleur nationale. Les rues des grandes villes espagnoles étaient noires de monde ou plutôt rouges, de la couleur des tee-shirts et des casquettes des participants. De loin, on aurait pu croire à un sursaut de l’extrême gauche pour proposer une alternative à la dépression économique et sociale mais la symbolique des couleurs est trompeuse et il s’agissait en fait de la première grande manifestation contre un projet du gouvernement espagnol d'autoriser pleinement l'avortement. Des slogans comme "Il n'existe pas le droit de tuer, il existe le droit de vivre", étaient en tête des cortèges. Une jeune fille à peine sortie de l’adolescence, tenant une poussette multiplace dans chaque main, hurlait : « Avortons la loi, pas la vie ». Les vieux n’ont pas le monopole du bigotisme et la séparation entre l’Eglise et l’Etat est loin d’être consommée en Espagne.

Les milieux catholiques, farouchement opposés au projet de loi, n’ont pas lésiné sur le budget communication. Le coût de la manifestation de dimanche est estimé à 100 000 euros et les évêques ont lancé une campagne anti-avortement, diffusée sur 1.300 panneaux à travers le pays, pour dénoncer le fait que, selon eux, les animaux en voie de disparition comme les lynx sont mieux protégés que les embryons humains.

Actuellement, l'avortement n'est autorisé en Espagne qu'en cas de viol dans un délai maximum de 12 semaines de grossesse, de malformations du fœtus (22 semaines) ou en cas de "danger pour la santé physique ou psychique de la mère" (sans limitation de temps). Que diraient les 343 salopes signataires du fameux manifeste en 1971 de cette législation encore féodale ?

Heureusement d’autres images de l’actualité s’inscrivent plutôt dans l’héritage de mai 68 : les manifestations contre le processus de Bologne, qui prévoit la mise en place d’un espace européen de l’éducation supérieure. Les étudiants espagnols sont particulièrement mobilisés contre ces réformes, dénonçant la commercialisation de l’université et le glissement vers un système élitiste. Il ya régulièrement de « joyeux affrontements » avec les forces de l’ordre. « Autrefois, nous n'avions que le pavot. Aujourd'hui, le pavé », chantaient leurs aînés. Des dizaines d’entre eux occupent également les locaux des universités. Ces actions, en plus de leur portée révolutionnaire, permettent à ces jeunes d’expérimenter la vie en communauté, d’échapper au tanguysme généralisé et de profiter d’un hébergement à moindre coût. Seul inconvénient et comme le commentait une étudiante qui avait approché les « territoires occupés » : cela commence à sentir le fauve. En effet l’option, pourtant économique, femme de ménage équatorienne n’est pas incluse dans le package squat. L’idéalisme de ces jeunes sera-t-il plus fort que l’odeur pestilentielle ? Courrez camarades, le vieux monde est derrière vous…

mardi 24 mars 2009

On a tout essayé














Le titre de cette émission à succès peut décidément s’appliquer à mon parcours professionnel qui, avec les années, devient de plus en plus éclectique. En effet, poussée par « la bise et la famine », je m’apprête à faire un remplacement de professeur de français dans un collège de jésuites de Saragosse. Ceux qui me connaissent vont trouver l’idée complètement surréaliste. Je vous rassure, je n’ai pas pris de drogue, retourné ma veste ou rencontré Dieu dans un moment de désespoir, il s’agit juste d’une courte mission. C’est aussi une manière de mieux combattre l’Ennemi, en apprenant à le connaître et en l’attaquant de l’intérieur. Et puis, j’ai la « bénédiction » de ma mère, farouche défenseuse du l’école laïque et qui m’a élevée, par tradition familiale, dans la méfiance des curés.

Cette brève incursion dans le monde de l’Eglise viendra se ranger aux côtés de mes expériences les plus improbables. Je pense en particulier à ma période de communicante dans le secteur agricole et à ce moment inoubliable où, en robe et taillons aiguilles, je m’enfonçais dans la boue d’un salon « plein champs », sous le regard éberlué de paysans rougeauds. Il y a eu aussi ma carrière interrompue trop tôt de barmaid à Londres, qui m’a permis d’apprendre à lire sur les lèvres de n’importe quel alcoolique et d’acquérir un anglais de l’East End qui surprend toujours les supposés sortis d’Oxford. J’ai failli oublier ce poste particulièrement intéressant de « rentreuse de données », digne d’une séquence des Temps Modernes. Une fois un carton vidé, j’en prenais un autre et recommençais à l’infini quand il n’y avait plus de cartons. Ah ces après-midi interminables, ces heures qui défilent et cette horloge sur le mur…

La Directrice de l’établissement souhaite me rencontrer dans les prochains jours et j’ai préparé un argumentaire inattaquable, en particulier en ce qui concerne mes objectifs dans la vie : « je souhaite rencontrer rapidement un gentil homme blanc catholique, me marier à l’Eglise, lui faire plein d’enfants sans utiliser de contraceptifs, en profitant du peu de temps qui me reste pour procréer. J’arrêterai aussi de travailler pour me consacrer pleinement à ma famille et à l’éducation de mes enfants. Les enfants, bien sûr, iront dans une institution religieuse, pour ne pas être pervertis par des idées impures. » Je peaufine encore pour être vraiment dans la peau de la fanatique. Si j’en fait trop ou si cela ne sonne pas tout à fait juste, n’hésitez pas à me le dire.

Je vais enfin pouvoir vérifier la véracité de certaines pratiques d’enseignement, dans ces « maisons du Seigneur ». Un de mes anciens collègues, O, m’avait en particulier parlé du film anti-avortement qui était régulièrement diffusé dans les cours d’éducation civique. J’ai eu l’occasion de le visionner et c’est presque insoutenable, dans le plus pur style gore. Alien ou Saw à côté, c’est Casimir ou Candie. Aux dernières nouvelles, O avait entamé une procédure pour se faire débaptiser, enfin capable d’affronter ces images atroces. Le système éducatif catholique espagnol a aussi profondément marqué Pedro Almodovar dont les films sont peuplés de personnages hors norme, ayant tous des comportements sexuels déviants : masochistes, voyeurs, nymphomanes, nécrophiles, fétichistes… La vague de folie et de libertinage qui a suivi la fin du franquisme explique ses choix cinématographiques mais il faut aussi chercher du côté de souvenirs d’enfance indélébiles qui lui ont d’ailleurs inspiré un film, La Mauvaise Education. Le pitch se passe de commentaires : « Deux garçons, Ignacio et Enrique, découvrent l'amour, le cinéma et la peur dans une école religieuse au début des années soixante. Le père Manolo, directeur de l'institution et professeur de littérature, est témoin et acteur de ces premières découvertes… ». Mais ne diabolisons pas trop cet univers encore inconnu, avec des idées préconçues.

Je suis certaine que mon passage dans cet institut, même furtif, sera bénéfique pour les élèves. Je pourrai moduler les cours à ma façon et leur donner de précieux conseils en matière d’éducation sexuelle, le tout en français, en parlant notamment de l’importance d’avoir différents partenaires pour avoir des points de comparaison, en les incitant à ne pas écouter les divagations d’un vieux puceau sénile concernant le port du préservatif, en les faisant lire Duras, Sagan, Despentes et bien d’autres. Je deviendrai un peu leur Mr Keating version fille et lorsque je serai renvoyée pour influence subversive, ils monteront tous sur les tables en disant « Capitaine, mon Capitaine ».

Affaire à suivre… J’ai hâte, j’ai hâte.

jeudi 19 mars 2009

Que le peuple s'amuse !
















L’économie est en berne mais le moral des espagnols reste au beau fixe, dès qu’il s’agit de sortir et s’amuser. L’esprit de fête, tellement caractéristique de ce peuple, n’est pas encore mort, en témoigne un rendez-vous incontournable : las Fallas de Valence. Chaque année, en mars, Valence s’anime avec l’apparition d’immenses personnages de carton-pâte installés à tous les coins de rue. Pendant une semaine, l’ambiance est à son comble, entre processions, rafales de pétards le jour et feux d’artifice la nuit. Avant un grand feu de joie final, qui réduira en cendres ces sculptures éphémères...

Qui dit événement populaire dit mode de transport adéquat : l’autobus. La compagnie qui permet de relier Saragosse à Valence porte un nom particulièrement exotique et enchanteur : Autobuses Jimenez… Il réveille surtout des souvenirs d’enfance puisque qui n’avait pas un Jimenez dans sa classe, assis avec les rebelles du fond ? Dans mon cas, il s’agissait une famille de gitans fous qui ont persécuté et traumatisé des milliers d’écoliers. A la simple mention du nom de cette tribu d’enfants sauvages, nous fuyions sans nous retourner, nous délestant de tout surpoids inutile, comme nos cartables Tan’s pleins à craquer. L’apprentissage de la survie dès le plus jeune âge !

La fête commence pendant le voyage, et, peu importe le lieu ou l’occasion, les comportements sont universels. Le bus est plein de bandes de jeunes qui consomment de l’alcool sans modération, ne sachant pas exactement ce qu’ils célèbrent mais vivant l’instant pleinement. Profitez-en car vos homologues français sont désormais entrés dans l’ère de la prohibition généralisée, avec la nouvelle interdiction de vente d’alcool au moins de 18 ans. J’avoue avoir quelques réserves par rapport à ce type de rassemblement, depuis un certain été où j’avais travaillé comme serveuse pendant la Feria de Dax. Cette expérience m’a permis d’aborder la beuverie collective sous un autre angle et de connaître l’envers du décor, d’un point de vue sobre. Je me revois encore animée d’un profond sentiment de solitude avant d’aller courageusement prendre la commande de hordes de « rugbypèdes » assoiffés (et pas seulement d’alcool), et ce en dépit de cubis ingénieusement reliés à leur bouche par des tuyaux et fixés sur le dos. "Fataaaaal !"

Valence a une délicieuse spécialité : l’agua de Valencia, mélange de cava et de jus d’orange, mais les jeunes espagnols préfèrent le calimocho, préparation à base de vin rouge et de coca cola (ô sacrilège !). Cette potion maléfique aura raison de certains de mes compagnons de voyage. Il y en a un surtout qui ne verra jamais Valence, oublié comme un vieux chien galeux sur une aire d’autoroute. Il fait des grands signes mais aucun de ses « amis » ne semble avoir noté son absence. Adios muchachito !

La fête bat son plein dans la rue. Il ya beaucoup de monde et surtout beaucoup de bruit, grâce à la charmante coutume des « petardos ». Les falleros, toutes générations confondues, ont les poches pleines de munitions et s’en donnent à cœur joie. Un grand jeune homme, sorti depuis très longtemps de l’adolescence, lance une série des pétards tout en renversant un peu de bière sur mes chaussures. Il sautille sur place, tout content de lui. Je lui lance un regard assassin, et il baisse la tête, tout penaud. Comme le dit si bien Bedos : « On peut être du côté du peuple mais on n’est pas obligé de vivre avec». Et puis il s’agit sûrement de l’un de ces Tanguy attardés, à qui j’aurais finalement rendu service, lui faisant prendre conscience de l’urgence de s’émanciper.

Le climax sonore est atteint au moment de la mascleta, véritable spectacle pyrotechnique de poudre laissant le spectateur abasourdi et en pleine extase. Tous les jours à 14 heures, un tonnerre d’explosions éclate, un nuage de fumée opaque enveloppe la foule qui frissonne de plaisir, la valse des hélicoptères donne le tournis… This is the End… Ce n’est pourtant pas une scène d’Apocalypse Now mais une tradition populaire aux origines mystérieuses.

Les Fallas, c'est aussi et avant tout la liberté d'expression excluant toute censure, qu'elle soit politique, sociale, religieuse ou morale. Les géants de carton permettent ainsi de faire la satire joyeuse des puissants. La mairesse actuelle, Rita Barberá, n'est jamais épargnée, souvent représentée dans des situations cocasses. Il faut dire qu’elle est une source d’inspiration inépuisable : lesbienne, farouchement conservatrice et membre du clan des méchants, le Partido Popular régulièrement éclaboussé de scandales. C’est curieux, j’ai toujours cru que les homosexuels, après des années d’oppression et de ségrégation, ne pouvaient être que progressistes, athées et de gauche. Rita Barberá en est le contre-exemple vivant. Elle fait une apparition au balcon, mal à l’aise dans un tailleur jupe classique imposé et cernée de vieux sbires à l’air sinistre. Bien fait ! Si elle avait été de gauche, elle aurait pu risquer le cuir noir et enlacer sa compagne par la taille. Nous sommes loin des héroïnes de L World, série américaine destinée à casser l’image de la lesbienne camionneuse et qui montrent de séduisantes jeunes sylphides en chaleur, purs produits de fantasmes masculins. Rita Barberá, à l’inverse, a du inspirer Josiane Balasko pour son interprétation dans « Gazon Maudit ». Même de loin, nous percevons la fumeuse de cigares et la buveuse de scotch sec sans glace.

Ayant une irrésistible envie de calme, nous nous réfugions sur une plage presque déserte afin de déguster une paella tout en sirotant de la sangria. Une manière bien agréable de ne plus penser… Les espagnols ont décidément tout compris.

mercredi 11 mars 2009

Journée Mondiale de la Femme: mon oeil !















On a célébré le 8 mars dernier la Journée Mondiale de la Femme destinée à parler de notre rôle essentiel et célébrer notre libération durement obtenue. A cette occasion, les médias nous ont montré les femmes qui ont marqué l’actualité récente et qui sont censées nous servir d’exemples.

Nous avons vu tout d’abord Ingrid de Betancourt, avec son visage de Madone énigmatique, qui préfère garder pour elle les souffrances endurées durant sa détention par les farcs. Elle a un peu fait partie de notre quotidien pendant toute ces années puisque, chaque fois que nous allions à la mairie, elle nous souriait en poster géant. Trois de ses copains otages se montrent plus bavards dans un livre récemment publié et démystifient la figure de Santa Ingrid. Ils disent en effet qu’elle n’est pas du tout sympa mais au contraire froide, manipulatrice et du genre à faire bande à part. Tout ça parce qu’elle a refusé de faire un plan à quatre. Même au fin fond de la jungle, nous ne sommes pas à l’abri du harcèlement sexuel. Est venue ensuite la mère courage de l’année : Rachida Dati, cette boeurette partie de rien et qui est aujourd’hui le bras droit de notre empereur Nicolas I. Elle ne veut toujours pas avouer qu’elle a fait un bébé toute seule, faute de temps pour draguer ou parce qu’elle préfère les femmes. Les rumeurs les plus folles ont couru sur l’identité possible du géniteur, jusqu’à accuser Aznar, l’ancien premier ministre espagnol dont la petit moustache sévère n’est pas sans rappeler un personnage historique tristement célèbre, Adolphe H. Allons Rachida, crache le morceau ! Ce sera une avancée pour la cause des femmes autrement plus significative que ton congé de maternité express, mondialement commenté et critiqué.

Triste constat : même ces femmes de pouvoir sont encore prisonnières du carcan des préjugés et d’une société machiste. Que dirait Simone de Beauvoir et son « Deuxième Sexe », ouvrage qui semblait pourtant annoncer l’entrée dans la modernité et la fin de notre esclavage (on m’aurait menti)? Mais en fait, ma mère mise à part, qui est mon modèle de femme sur terre ? Samantha Jones bien sûr ! Sauf qu’elle n’existe pas vraiment, c’est un personnage de série et puis elle a une sexualité d’homme. En parlant de femme-homme, je repense soudain à E, ma responsable lorsque je travaillais au Québec, corse par son père et khmer rouge par sa mère. Un mélange explosif qui la prédestinait au despotisme. Elle régnait en effet en maîtresse femme sur le département, tyrannisant le personnel avec son sourire à la JR Ewing et ses 40 kilos en trop. Elle avait tout de même réussi à se marier, la quarantaine largement passée, mais l’heureux élu vivait à Vancouver, à quelques 7000 km. « Loin des yeux, loin du cœur », nous pensions tous, mais personne, parmi les sous-fifres asservis, ne se risquait au moindre commentaire, par crainte de sanglantes représailles. Pauvre homme (le mari). Je revois encore son air traqué sur les nombreuses photos de mariage exposées comme des trophées dans le bureau de E. Elle le tenait fermement par l’épaule et il semblait vouloir dire : « sortez-moi de là ». J’ai eu des nouvelles indirectes de E récemment. Je feuilletais l’annuaire des entreprises classées au CAC 40 et je suis tombée sur son sourire carnassier. Son intitulé de poste s’était allongé mais elle n’avait pas changé. En même temps, c’était un peu normal car elle utilisait déjà cette photo, soit disant amincissante, avant notre collaboration qui remonte déjà à presque dix ans. Qu’est-ce que j’ai pu la détester !

Revenons à Simone B et aux préceptes qu’elle annonçait dans sa bible du féminisme. Elle écrivait notamment : « C'est par le travail que la femme a en grande partie franchi la distance qui la séparait du mâle ; c'est le travail qui peut seul lui garantir une liberté concrète.» Parlons-en de l’égalité dans le travail. A l’approche de la date fatidique du 8 mars, les articles traitant de la place de la femme dans l’entreprise ont foisonné pour mieux nous révéler que le combat est loin d’être gagné : parcours semé d’embuches pour accéder aux postes stratégiques, salaires low cost, sexisme… C’est mal vu d’être dans le schéma classique « mariée avec enfants » car nous ne pouvons pas nous donner corps et âme à notre employeur mais également suspect de ne pas l’être. Alors que faire ? Changer de sexe ? En créer un Troisième ? Une autre alternative est aussi d’aller grossir les rangs des « pétasses.com », agences de relations publiques composées uniquement de femmes, au risque de tomber dans les griffes d’une sociopathe comme E, qui se repasse en boucle « Le Diable s’habille en Prada ».

L’Espagne a voulu jouer la carte de la parité, en nommant un nombre significatif de ministres femmes et notamment une future maman à la Défense. Imaginez, une MAM, jeune, socialiste et enceinte ! Je reste tout de même sceptique, sachant combien il est difficile d’être une jeune femme moderne et émancipée dans la quatrième ville d’Espagne. C’est comme le mariage gay, du trompe l’œil. En effet, depuis mon arrivée en Espagne, je n’ai pas vraiment l’impression d’assister au triomphe de la cause homosexuelle, surtout à Saragosse. L’ambiance est plutôt à « I am the only gay in the village ».

Mais les vraies héroïnes du jour, ce sont toutes celles qui font votre quotidien. La femme qui vous a mis au monde, celle qui vous accompagne, celle qui vous nourrit, celle qui vous console, celles qui vous aiment et toutes les autres que vous ne connaissez pas encore. Avouez messieurs, qui a pensé à accorder un traitement spécial aux femmes de sa vie le 8 mars et ne vous réfugiez pas derrière les fausses réponses : « pour moi, c’est tous les jours la fête des femmes » ou « je suis pas très fort en dates »? Sans rancune.

lundi 9 mars 2009

Douce France













On a beau avoir à peu près réussi son intégration dans sa terre d’adoption, il est presque impossible de ne pas souffrir de temps en temps du mal du pays et d’avoir un besoin viscéral de fouler, ne serait-ce que pour quelques heures, le sol français. Je l’ai bien compris l’autre jour lorsque, devant rendre visite à des amis dans le Béarn, près de Pau, je n’ai pas pu passer la frontière à cause d’une mauvaise conjoncture météorologique. Les éléments naturels étaient contre moi et je me voyais mal dans le remake de « En Pleine Tempête » version neige, attendant en vain le Georges Clooney maño pour me sauver. Nous, exilés volontaires ou contraints, sommes toujours déchirés entre notre nécessaire acclimatation au lieu qui devient notre « maison » et la nostalgie de l’endroit d’où on vient, dont il nous est impossible de faire le deuil. Pourtant, dans mon cas, la France est à deux pas mais un monde sépare nos deux pays, une montagne aussi, parfois infranchissable… Si loin, si proche.

Je tiens à souligner que mon attachement à l’Espagne est profond et sincère, même si je me moque parfois du « tanguysme » des jeunes, du « bigotisme » des vieux, de leur relation orgasmique au foot, de leur apprentissage dans la douleur des langues étrangères, des effluves « enivrantes » des eaux de Cologne pour hommes, de l’approche expérimentale de la coiffure… Qui aime bien châtie bien comme on dit.

Les coiffeurs espagnols représentent tout de même un danger réel et je vous recommande de réfléchir à deux fois avant de tenter l’aventure. Il ne faut surtout jamais laisser carte blanche à l’un de ces « psychopathes du ciseau », au risque de vous retrouver avec une coupe asymétrique, des extensions de cheveux multicolores ou, pire, avec un « flequillo », la fameuse frange espagnole qui permet de les distinguer du reste du monde. C’est en connaissance de cause que je parle car j’ai bien failli être une victime de plus. Convaincue par une coiffeuse manipulatrice que quelques mèches plus courtes sur le devant mettraient mieux en valeur mon visage enfantin, j’ai vu avec horreur commencer à se dessiner une frange et j’ai eu juste le temps d’arrêter les ciseaux qui coupaient frénétiquement. Il s’en est fallu de peu pour que je me retrouve avec la fameuse coupe au bol de mon enfance, imposée par une mère fan des Beatles. Avec mes dents écartées à la Sylvie Vartan, j’avais tout d’une rescapée des années yéyés.

Mais j’arrête de dire du mal de mon pays d’accueil car je vais bientôt passer pour l’une de ces françaises qui développent un complexe de supériorité, dès qu’elles se trouvent à l’étranger. Ayant plusieurs expatriations à mon actif, j’ai en effet noté quelques caractéristiques récurrentes dans le comportement de mes compatriotes, qui se répètent d’un pays à l’autre. La France, pays des droits de l’homme, liberté, égalité, fraternité… Nous sentons alors que nous avons pour mission de prêcher la bonne parole et de nous imposer comme le modèle, l’exemple à suivre. Tous les pays que nous « colonisons » font partie du « quart-monde » et nous traitons avec une pitié condescendante les « bons sauvages » qui les peuplent. Et puis surtout, restons groupés car ils pourraient nous contaminer. Je me sens toujours très fière de mes origines quand je voyage. Certains importent aussi des concepts typiquement français, en se disant qu’il n’y a rien de valable au niveau local. C’est le cas du directeur d’un journal francophone de Madrid, qui assume pleinement le degré zéro d’information et la pratique de la langue de bois de son canard. Il organise des cocktails « after work », sur le modèle de ceux qui plaisent tant aux jeunes cadres dynamiques parisiens. Ce même journal publie des photos de ces chouettes soirées et on peut voir des costards-tailleurs en grappes qui se trémoussent maladroitement et échangent leurs cartes de visite. Quelle horreur, je n’ai pas fui Sarkoland pour subir ça de nouveau ! Je préfère largement traîner dans les bars louches, en compagnie de réfugiés politiques sud-américains qui me racontent les conditions terribles de leur exil forcé, cherchant à m’attendrir pour me faire ensuite des propositions malhonnêtes. Citoyenne du monde certes, mais jusqu’à quel point ?

Je repense à mon rendez-vous manqué avec la France. Ah le Béarn, ses vertes prairies, ses montagnes à la Heidi, ses bons fromages mais quand vient le soir… brrrrrrrr. Il semble que Pau a imposé le couvre feu car, passé minuit, même les chiens ne se risquent pas dans les rues. C’est curieux car la ville a longtemps eu un maire socialiste et homosexuel qui avait la réputation de placer ses camarades de jeu à des postes clés. Il semble qu’ils n’ont pas su imposer le sens de la fantaisie et de la fête qui caractérise souvent la communauté gay. Cela aurait été bien différent si le poste avait été tenu par certaines personnes que je connais et que je ne nommerai pas. IRENE PRESIDENTE ! Elle dirait d’ailleurs, d’un regard las derrière ses faux cils : « ces gays de province, il n’y a rien à en tirer. »

La France a vraiment des choses à apprendre de ses voisins espagnols. Je songe à ces familles entières tassées dans des bars enfumés à l’heure de l’apéritif, faisant un pied de nez à la crise et aux risques de tabagisme passif pour Junior qui suffoque dans sa poussette. Je vois ces mamies en goguette qui, bras dessus bras dessous, refont le monde en arpentant les rues à trois heures du matin. Et puis le temps s’est mis au beau fixe, l’été est déjà là et les premiers coups de soleil aussi … La vida es bella, même en temps de crise ! Viva España!

jeudi 5 mars 2009

Les joies des retours de province

















Correspondance particulière

J’adôoore les voyages en train. L’autre jour, avec Anne, mon amie d’enfance, nous avons énormément ri dans un tgv qui nous ramenait à Paris, après un week end au pays. Le train était bondé et nous avons du lutter durement pour récupérer nos places réservées côte à côte, qu’une femme accompagnée d’un enfant en bas âge nous suppliaient de lui laisser. « La prochaine fois vous réserverez, ai-je dit avec élégance et fermeté, et puis ce n’est pas la peine de nous faire le coup du chantage affectif ». Elle est alors partie s’installer sur l’un des strapontins des entre-wagons, en reniflant et serrant fort son enfant. Elle a ainsi pu profiter du voisinage sympathique de jeunes rappeurs fumeurs de joints, rebelles aux consignes de respect d’autrui et d’interdiction de fumer.

Sur ce nous nous sommes installées bruyamment, parce que nous étions chargées, un peu énervées de tout ce grand air, et puis aussi parce que nous aimons bien faire du bruit et nous faire remarquer. D'autant plus que dans ces trains de Vendée, les gens ont à cœur de faire croire que non non, pas du tout, ils ne sont pas eux même de Vendée. Ils sont juste venus rendre visite à des amis for the Vendée Globe Challenge, you know. D'autant que le TGV en Vendée, c'est tout nouveau.

Pour finir, nous avons réussi à caser tous nos sacs et cabas, dont le sac a roulettes d’Anne qui fait énormément de bruit. Restaient nos vestes-doudounes, et là j’ai montré à Anne une petite étagère à mi hauteur faite exprès. Mais il fallait tasser un peu les vêtements. J’ai donc enlevé ma vieille doudoune en vraies plumes d'oies qui n'en peut plus et qui perd ses plumes, et je l’ai tassée tant bien que mal dans la demi-étagère sous le truc à bagages.

Je tassais, tassais, et les plumes volaient, volaient ... Jusque sous le nez de nos deux voisins de devant. Comment dire... Deux pétasses parisiennes. Sans doute vendéennes d'origine. Peut être même de la Mothe Achard ou de Saint Mathurin. Landeveille ? Non peut être pas quand même... Mais résolument scotchées à leur ordinateur portable pour visionner un dvd. Alors toutes ces plumes d'un coup qui voletaient et leur chatouillaient le nez, ça les agaçait ces connasses. Elles agitaient les mains et faisaient des moulinets avec leurs frêles poignets de parisiennes mon œil. Alors j'ai dit : "ha scusez nous, savez ce que c'est, on ramène des poules de Vendée à Paris, alors, forcément ça fait des plumes...". Et Anne a ajouté : "ben je ne comprends pas, on les a plumées pourtant ?" Et les deux idiotes qui agitaient les mains et soupiraient...

Nous avons passé le reste du voyage à nous inquiéter en parlant fort de ces pauvres poules de St Mesmin que nous avions accrochées en haut juste au dessus (« Allaient-elles perdre encore un peu de sang ? ») et à nous réjouir de cette bonne poule au pot que nous allions pouvoir nous faire un de ces dimanches.

Les deux de devant on ne les a pas entendu. Mortes de honte je pense... Surtout si l’une était vendéenne, et l'autre pas. Genre retour à Paris après un week-end fiançailles à St Mathurin. Présentation aux beaux parents qui avaient du faire des efforts pour planquer les napperons de dessus la télé et les photos de famille où on a trop bu, genre danse des canards ou pire la chenille, tous rougeots de trop de Mareuil.

Quand nous avons ouvert la bouteille de vin rouge (c'était même pas du Mareuil) et les sandwichs, j'ai fort regretté que ce ne soit pas du pâté qui sentait très fort. Pour compenser, j'ai suggéré qu'on renverse du vin rouge qui tache sans faire exprès sur les pulls en cachemire de nos deux voisines de devant. Mais Anne a mis le holà : "T'es trop folle et trop en nerfs" m'a t'elle dit. "Et puis c'est pas parce que t'es malheureuse qu'il faut t'en prendre aux autres". On a tellement ri ... Très fort. Les gens n’aiment pas qu'on rit fort.

Anne avait raison : un attentat au vin rouge, ça peut porter à conséquence durablement au niveau des relations internationales et même interrégionales. Vu le contexte et la carte des régions redécoupée par Balladur, tout peut être interprété n'importe comment. C'est tellement tendu, avec cette crise en plus, qu'on a vite fait de passer pour des pétasses sarkosiennes, voir devilliéristes. Manquerait plus que çà, quel scandale !

Mon Dieu, qu'il est difficile de survivre, même en week-end au pays, dans ce monde post moderne et traversé par les crises et les mutations...

Irène B, réfugiée politique vendéenne, camouflée quelque part dans un ministère parisien

mercredi 4 mars 2009

Ressources Humaines : je vous hais !













Le téléphone pleure quand ILS n’appellent pas. Combien sommes-nous à nous sentir dans la peau d’un acteur au chômage, en attente du rôle de sa vie ? Par ILS j’entends bien sûr ceux qui ont le pouvoir de vie et de mort sur nous, les toutes puissantes Ressources Humaines, ou plutôt INHUMAINES, qui semble un terme plus approprié. La question est de savoir si le marathon des entretiens, le discours langue de bois et les sourires forcés me manquent vraiment, car l’un des privilèges de travailler dans le secteur de la communication est que les incidents de parcours correspondent aux périodes d’activité et non l’inverse. Nous sommes devenus des intermittents du travail. Camarades artistes, unissons-nous ! Signez le manifeste anti-RH ! No Pasaran !

J’ai donc beaucoup fréquenté l’Ennemi et rencontré des recruteurs de tout poil qui s’acharnent sur nous avec des outils toujours plus sophistiqués, nous dissèquent, nous sondent pour finalement nous dire : « on vous rappellera », « on ne prend que la crème de la crème », « on préfère les brunes »… Méfiez-vous, ô RH sans cœur, dans une prochaine vie vous serez réincarnés en demandeurs d’emploi et ce sera à notre tour de vous torturer !

J’ai aussi visité toutes sortes d’entreprises : starts up dont les jours sont comptés, agences de pub imposant l’usage de drogues, administrations poussiéreuses d’où on part en courant à la vue de ses futurs collègues de travail, laboratoires pharmaceutiques testant des médicaments sur des enfants africains et parlant de leur engagement dans le développement durable… Honte à vous ! Fort heureusement et bien qu’ayant dit beaucoup de mensonges comme : « je suis très intéressée par la finance et lis les Echos tous les matins » ou « je souhaite m’investir à long terme dans le secteur automobile », je n’ai pas encore vendu mon âme au diable. Jusqu’ici tout va bien.

Un coach professionnel m’avait conseillé de penser à des images paisibles comme un avion au décollage ou une plage des Caraïbes, avant de commencer un entretien. Je réalise l’exercice sans problème, mais à la sortie, c’est un tout autre type de visions qui me viennent. En effet, je me vois plutôt comme le fou furieux dans « Massacre à la Tronçonneuse » ou Anthony Perkins répétant inlassablement la scène de la douche dans « Psychose ».

Les Ressources Humaines et moi nous n’avons jamais fait bon ménage et nos relations ont atteint leur point paroxystique, lors de mes retrouvailles involontaires avec une « camarade » de lycée, depuis longtemps perdue de vue. Effectuant une mission de consulting dans l’entreprise X, je suis amenée à faire la connaissance de la Directrice des Ressources Humaines, et, même à quelques mètres de distance, je l'ai reconnue immédiatement. Grande, voutée, dents de cheval, cheveux gras, pull serpillère bariolé, et surtout un prénom évoquant une espèce rare de plantes vénéneuses, il n’y avait pas de doute, c’était bien Arachnophobia (la décence m’impose de changer son nom mais sachez qu’il est phonétiquement proche) ! « Toi non plus, tu n’as pas changé ». Les souvenirs ont afflué d’un coup et j’ai revu les railleries, le prix spécial du jury dans la catégorie « pas cool irrécupérable, tronche de looser, reste chez toi » et surtout moi au premier rang des persécuteurs. La jeunesse est cruelle. Malheureusement, Arachnophobia n’avait pas la mémoire sélective, même si je lui ai expliqué qu’il y avait bien une Valérie M à Toulouse me ressemblant étrangement, mais que, à l’époque des faits, je vivais en Argentine et que surtout ce n’était pas du tout mon genre de me moquer gratuitement du physique ingrat d’un personne. Je ne suis pas sûre qu’Arachnophobia ait cru à mon enfance sud-américaine et pendant toute la durée de notre collaboration, elle n’a au de cesse de me lancer des regards intenses qui paraissaient dire : « je me souviens de tout ». La revanche du Vilain Petit Canard.

L’Espagne a une approche plus surréaliste du métier. Je ne reviendrais pas une fois de plus sur mon recrutement « speed dating » par celui à qui on devrait interdire l’exercice de la profession de publicitaire : le beau Dean. En cinq minutes, dans un bar, emballé c’est pesé, « tape là ». En plus du bronzage, l’argent de Papa et les vacances à Ibiza, ça faisait branché d’avoir une « parisienne » dans l’équipe. J’aurais du me méfier. Il y a eu ensuite l’entretien en anglais pour participer à un projet international, face à interviewer qui avait quelques lacunes linguistiques. Il m’écoutait avec bienveillance, oscillant de temps en temps la tête bercé par la musicalité de mes paroles, mais je voyais bien, à son regard vide, qu’il ne comprenait rien à ce que je disais. J’ai alors risqué quelques gros mots pour être sûre. Il n’a pas bronché et a continué à sourire bêtement.

Mais une expérience récente vécue par mon ami C, compagnon d’infortune qui cherche un poste dans le marketing (avis aux recruteurs !), surpasse l’imagination et remporte la palme du bon goût. C, las de ne pas trouver dans sa branche, s’est résigné à postuler pour une place de vendeur dans un grand magasin d’électro-managers et est convoqué à un entretien. Après avoir parlé avec une passion non feinte des frigos et des machines à laver, il est invité à participer à un exercice de groupe, destiné à mettre en avant son esprit d’équipe et sa capacité à s’imposer. Je résume l’énoncé : « Vous devez-vous vous échapper d’un camp de concentration et pour cela prévoir l’achat d’un certain nombre d’objets. Seules cinq personnes dans la liste des profils décrits ci-dessous pourront s’évader et vous devez décider lesquelles. » C’est bien connu les camps de la mort étaient équipés de superettes ouvertes 7j/7j. C a alors proposé d’éliminer le personnage du soldat sénégalais des candidats à Prison Break, expliquant qu’un noir en pyjama rayé courant dans les prairies de l’Allemagne Nazie avait peu de chance de passer inaperçu et pourrait mettre en péril les autres évadés. Indignation de l’ensemble des participants, peu sensibles à son esprit pratique : « tu es raciste. C’est de la ségrégation ». Un autre a même ajouté : « Ce n’est pas parce qu’il est sénégalais, qu’il est noir. ». Dépassé par ces considérations trop intellectuelles, C s’est alors pris alors la tête entre les mains et s’est dit qu’il allait peut être rester un peu plus longtemps au chômage. Après ce genre d’épreuves, C pense de plus en plus à monter sa propre structure. Ma petite entreprise ne connaît pas la crise…

dimanche 1 mars 2009

Spanglish
















Intense émotion en Espagne et renforcement de la cohésion nationale pour quelques heures, lors de la remise de l’oscar du meilleur second rôle à Penélope Cruz. Ravissante dans sa robe de princesse, Pe, comme on l’appelle ici, a remercié le réalisateur «Woodich Rallen» et conclut son discours par un «fankiouch everibodich ».

10 ans d’expatriation à «Rolioude» et une liaison avec le patron de secte Tom Cruise n’ont pas réussi à polir cet accent espagnol décidément tenace. L’expression bien connue « parler anglais comme une v…. – ruminant en 5 lettres - espagnole » prend soudain tout son sens. Cela me fait penser à ma fidèle comparse C, espagnole vivant à Paris, qui propose souvent d’improviser un petit «truch» ou fait des constats déchirants comme : «les mecs, touch des nulchs!». Pardon C, je t’adore et garde ton accent car, comme tu as pu le constater en QUELQUES occasions, c’est un atout de séduction infaillible avec les garçons. Un petit effet de voix à la Victoria Abril et le tour est joué.

L’apprentissage de l’anglais reste un problème majeur en Espagne. Les Schools of English affichent complet et les jeunes espagnols, désireux de ne pas rater le train de la mondialisation, affluent dans les rencontres linguistiques internationales. Hélas, faute de la participation d’anglais de souche, las d’assister au massacre de leur langue maternelle, les espagnols se retrouvent à reproduire leurs « écorchages » entre eux et on assiste à l’apparition d’un nouvel hybride : le spanglish. Il n’est alors pas toujours facile de deviner qui est ce célèbre groupe des années 80 « Ou Dosse », cette star des années 50 « Rita Révor » ou ce classique du cinéma d’honneur « Ralovin », mais c’est, et de loin, la confusion entre le masculin et le féminin, due à l’impossibilité génétique de prononcer le « He », qui génère le plus de quiproquos. Démonstration: « I had a german boyfriend, she was a doctor… ». Réponse : « C’était avant ou après son changement de sexe ? »

Mais revenons à ce moment de liesse collective, presque plus beau qu’une victoire du Real Madrid: le couronnement de Pe. On nous a montré à l’occasion la morne petite banlieue de Madrid où elle est née, ses voisins, ses anciens professeurs, son facteur, ses éboueurs etc. Les images parlent d’elles-mêmes et on mesure l’ampleur du chemin parcouru, pour devenir une étoile de «Rolioude». Ce n’était pas gagné le rêve américain. Bizarrement, Pe fait moins l’unanimité auprès de la gent féminine. Au contraire, toutes s’accordent pour dire qu’il ya de meilleures actrices en Espagne, qu’elle n’est pas si belle que ça ou, pire, qu’elle a du coucher pour arriver. Allons les filles, soyez franches, vous êtes tout simplement JALOUSES. Ayant depuis longtemps surmonté mon aversion naturelle pour les brunettes, j’émets un jugement plus subtil, en m’étonnant qu’on salue la performance d’une actrice dans un film globalement mauvais.

Pourtant moi aussi, cette Penélope m’énerve car elle sort avec le sublime Javier Bardem, l’Homme avec un grand H, le mâle absolu… Pour reprendre la réplique désormais culte d’un film français dédié aux femmes : « Javier Bardem, il couche avec moi, me jette, oublie mon prénom, me tire les cheveux, je kiffe ! ». Mais il n’était pas à ses côtés pour les Oscars et on parle de leur relation en termes de coup de pub médiatique, aussi, tous les espoirs sont permis. Javier, estoy aqui !