samedi 4 avril 2009

Le plus beau métier du monde ?




















Comme titre, j’avais pensé également à « Bienvenue en Enfer » mais je me suis dit qu’on tombait trop dans le tragique. Vous l’aurez compris, ma mission actuelle de professeur dans le collège « Maria Jesus El Salvador » n’a pas éveillé en moi une vocation tardive pour l’enseignement, loin de là. Il n’y a rien de jouissif à apprendre trois mots de français à une bande de gamins agités ni à jouer le rôle du méchant flic car au fond je suis comme eux. Moi aussi j’ai envie de pouffer en entendant les élucubrations de la « voix de Dieu » qui prêche la bonne parole tous les matins dans les haut parleurs (avant 10h, c’est France Inter ou rien), tirer les cheveux de la petite grosse à lunettes, me faire remarquer en allant cinq fois aux toilettes, dormir sur la table (surtout pendant le sermon matinal), jeter des bouts d’élastique sur mon copain Carlos (un jour je saurai pourquoi), faire l’école buissonnière…

On me dit que j’ai de la chance car les classes comptent à peine une vingtaine d’élèves et que ce sont des enfants relativement faciles, dressés dès le plus jeune âge, suivant les bonnes vieilles méthode jésuites. Il faut souligner tout de même que nous sommes en Espagne et que le niveau sonore des bavardages est tel qu’il double, voire triple les effectifs réels et la consommation d’aspirine des professeurs. Je pense soudain à ma mère qui totalise 38 ans de bons et loyaux services dans l’enseignement public et elle m’inspire une admiration grandissante. Elle a tenu bon face à des hordes de fauves toujours plus enragés et n’a pas pris un aller simple pour l’une des nombreuses «maisons de fous » sponsorisées par l’Education Nationale ni fait le choix des armes comme Isabelle Adjani dans La Journée de la Jupe. Dans ce film sorti récemment, Adjani interprète le rôle d'une professeur de français malmenée, chahutée, humiliée par sa classe dans un collège difficile de la banlieue parisienne et qui finit par prendre ses élèves en otages suite à la découverte d'une arme dans le sac d'un des adolescents. Le scénariste est probablement un vétéran de la « guerre de l’éducation ».

Je compatis en pensant au chemin de croix des professeurs de musique, obligés d’entendre chaque jour des centaines d’élèves massacrer à la flûte les grands classiques, ou des professeurs de philosophie, qui ont pour mission impossible d’inculquer les rudiments de la pensée de Platon à une assistance ignare nourrie de non culture hollywoodienne.

Je me repens car moi aussi j’ai péché, en étant bavarde, inattentive, rebelle, insolente… C’est promis je ferai mon mea culpa si je recroise l’un de mes anciens professeurs.

Cette expérience aura été tout de même bénéfique car je songeais il ya quelques temps préparer le CAPES, attirée par la garantie d’un emploi stable et le sentiment d’avoir une vraie utilité sociale. Cette option est désormais définitivement écartée. J’ai fermé pour toujours la porte de l’enseignement secondaire l’année de mon bac et il n’y aura pas de retour en arrière.

Qui ose parler de vocation pour définir ce métier ? Les professeurs sont tout simplement jetés en pâture, condamnés à survivre en milieu hostile et à essayer tant bien que mal de sauver leur peau. Je défis ceux qui aiment utiliser le slogan « enseignants feignants » de venir tester ne serait-ce que quelques heures leur capacité de résistance. La tendance actuelle est aux échanges de postes, histoire de sortir de la routine et de voir si l’herbe est plus verte ailleurs. Avis donc aux amateurs : venez vivre 24h de la vie d’un professeur !

A ce sujet, un canadien a eu une idée originale en 2007. Ne sachant pas ce qu’il voulait faire dans la vie, ce jobtrotter a décidé de tester un emploi par semaine pendant un an, et il a ainsi occupé successivement 52 postes en 52 semaines (http://www.oneweekjob.com/). Quel métier je pourrais bien essayer maintenant ? Médecin urgentiste bien sûr ! Je nourris un vieux rêve depuis toujours : répondre « Oui, moi » à la question « Y a-t-il un médecin dans l’assistance ?» puis établir un diagnostic long et complexe en utilisant de pseudo termes scientifiques latins et surtout je voudrais vérifier le mythe selon lequel les hôpitaux sont de vastes baisodromes où l’on croise des Georges Clooney à tous les coins de couloirs… Georges, j’arrive !

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